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Un système d’endiguement inattendu en Côte d’Or

Article de journal


illustration Un système d’endiguement inattendu en Côte d’Or

Au bord d’un affluent de la Saône, un merlon privé a cédé suite à un dessouchage, inondant une partie du village de Trouhans en 2024. Après étude, la communauté de communes a décidé de créer un système d’endiguement. Ce sera le premier sur son territoire.

Depuis sa création en 2004 la communauté de communes Rives de Saône (CCRS) n’avait jamais eu à se préoccuper de régulariser un système d’endiguement. Mais les pluies du printemps 2024 et l’intervention malencontreuse d’un riverain sur un remblai situé au bord de l’Ouche ont changé la donne.

En avril 2024, les pluies printanières ont fait gonfler les eaux de cet affluent de la Saône situé à 30 km au sud de Dijon, jusqu’à atteindre une crue cinquantennale. Il s’agit d’un secteur « hydrauliquement complexe, avec une vallée commune entre plusieurs cours d’eau, des transferts entre cours d’eau, des remontées de nappe, de très nombreux merlons agricoles, et une influence forte de la Saône à l’aval », signale Cédric Borget. Il est chef du pôle Inondations de l’Etablissement Public Territorial de Bassin (EPTB) Saône Doubs. Le secteur est complexe, mais aucune digue anciennement classée n’y est présente. Uniquement des merlons, autrement dit des remblais en terre qui ont été érigés à partir du curage historique de la rivière.

 


Crue de l'Ouche à Trouhans en 2013 (crédit : EPTB Saône Doubs)

 

Inondation en 2024
A Trouhans « nous avions déjà eu une crue de retour Q50 en 2013, mais il n’y avait pas eu d’impact, les merlons avaient joué leur rôle », raconte la vice-présidente en charge du cycle de l'eau à la CCRS, Jocelyne Beaunée. Au printemps 2024, les choses ne se sont pas passées de la même manière. Sur un des merlons, le propriétaire riverain avait précédemment entretenu la végétation et enlevé des souches présentes dans le remblai. « Sans penser à mal, il a nettoyé, il a dessouché et a fragilisé le merlon. Quand celui-ci a lâché, cela a créé une vague de submersion», explique le président de la CCRS, cité par le journal régional le Bien Public, le 26 juin dernier. Cette brèche inattendue a impacté 25 habitations et occasionné 400.000 euros de dégâts matériels, d’après la commune.

Face au risque induit d’une nouvelle inondation, la commune a alors saisi en urgence les services de l’Etat. « Le préfet et le sous-préfet ont validé de consolider en urgence le merlon avec des matériaux enlevés par la crue, mais ils ont demandé que soit réalisée ensuite une étude, pour déterminer si le merlon devait être classé et pour faire un état des lieux des ouvrages », ajoute la vice-présidente.

 


Brèche sur le merlon à Trouhans, avril 2024 (crédit : commune de Trouhans)

 

Etude d’opportunité d’un nouveau système
Lancée pendant l’été 2024 par la communauté de communes, l’étude a bénéficié d’un accompagnement (AMO) de l’établissement public territorial de bassin (EPTB) Saône Doubs. Un accompagnement utile, pour cette petite EPCI rurale (20.000 habitants) qui n’avait pas d’expérience des systèmes d’endiguement. « Le périmètre retenu pour l’étude couvre nos deux communes riveraines de l’Ouche, Trouhans et Echenon. Cela a permis de faire un recensement des ouvrages (uniquement des merlons) et des enjeux sur 17 km », explique Lydie Palmer, directrice Environnement à la com’com.

En se fondant sur l’analyse du fonctionnement hydraulique de l’Ouche et de la Saône et sur une analyse multi-critères, il est apparu opportun de créer un système d’endiguement à Trouhans. Le 18 juin, les élus de la CCRS ont voté pour sa création. Celui-ci devrait faire 2 km de long, soit bien plus que les 100 mètres de remblais impactés lors de la crue. Les élus ont aussi décidé de protéger une zone qui concernerait la majorité du village, soit 734 habitants et plusieurs établissements publics : école, mairie, ainsi que quelques entreprises, indique la CCRS, contre une crue cinquantennale de l’Ouche, mais sans rehausser les merlons.

 

Localisation de la brèche (crédit : CCRS)

 

EDD pour le système
« On n’est qu’au milieu du gué, il faut maintenant enclencher l’étude de dangers pour ensuite déposer une demande d’autorisation pour le nouveau système», poursuit Lydie Palmer. Les 100 mètres qui ont été réparés d’urgence seront aussi repris, pour être consolidés de manière durable, une fois l’autorisation obtenue.

Encore faudra-t-il conduire l’étude de dangers (EDD) nécessaire à la demande d’autorisation environnementale auprès de services de l’Etat. « Des relevés géotechniques vont être effectués. Le dépôt de la demande d’autorisation est prévue pour le printemps 2026 », ajoute la directrice environnement. L’EPCI va aussi devoir traiter le volet foncier du projet, afin d’obtenir la maitrise foncière du linéaire. Les 2 km de merlons sont en effet répartis sur une vingtaine de propriétés privées. « La CCRS envisage soit une servitude, soit une convention de mise à disposition », explique la vice-présidente, consciente que cela va probablement impliquer un travail conséquent de concertation avec les riverains.

Solidarité multi-échelle
L’ensemble de l’étude (étude d’opportunité et EDD jusqu’au dépôt du dossier) et les travaux de confortement sont chiffrés à plus de 230.000 euros. C’est une somme conséquente pour une EPCI rurale comme la CCRS. Sur ce projet, elle peut compter sur l’aide financière de l’Etat, puisque le Fonds de Prévention des Risques Naturels Majeurs (dit Fonds Barnier) et le Fonds Vert vont prendre en charge 80% des études et 65% des travaux. Le reste à charge sera payé par l’intercommunalité dans une logique de solidarité et de mutualisation, via la taxe Gemapi existante. Celle-ci était jusque-là utilisée exclusivement pour le volet « Gema » (gestion des milieux aquatiques).

A ce stade, l’intercommunalité salue la qualité du travail avec les services déconcentrés de l’Etat (DDT, DREAL) et avec l’EPTB. « Tous les acteurs ont été présents, ils étaient là pour apporter des réponses », se réjouit Jocelyne Beaunée, qui apprend en marchant les subtilités réglementaires et les complexités techniques des systèmes d’endiguement.

 

 

Contributeur

thibault lescuyer

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